Peu de nouvelles ces derniers temps, non pas qu’il ne se soit rien passé, bien au contraire : nous avons accueilli les quatre papis et mamies des enfants dans notre boucle, avec lesquels nous avons découvert l’Equateur. Et je profite d’une pause à Quito, la capitale de l’Equateur, deux jours avant leur départ, pour mettre à jour les notes de notre périple. Restez fidèles, nous en avons besoin, et ce n’est pas fini : encore 135 jours, ensuite vous serez libres ! A moins que nous ne vendions notre jolie maison et que nous continuions un an ou deux … 🙂 Mais là, j’ai une épouse à convaincre, et c’est pas de la tarte : appel aux bienfaiteurs qui se situeraient dans mon camp, si vous avez des arguments, faites passer ! Pour l’article de ce jour, je manque à mes récentes promesses, c’est pour m’entrainer à ma future carrière d’homme politique : le texte est long, mais j’espère que ça vaut le coup. Pour ceux qui font semblant d’avoir une vraie activité – donc, pas mes collègues voyageurs qui eux, ONT une vraie activité – lisez-le en plusieurs fois, où dites à votre chef que si il continue de vous emmerder toutes les cinq minutes, vous ne bouclerez jamais pour ce soir ce p….n de dossier ultra important attendu pour hier qui changera à jamais et sans aucun bénéfice pour vous le cours de bourse de la Big Brother Company à laquelle vous avez décidé de donner votre vie moyennant un salaire de misère et des conditions de travail dignes du Ministère Français de l’Evaluation de l’Intérêt et l’Efficacité des Dépenses de l’Etat – ça n’existe pas, je sais, justement. Nous avions donc repris la route le 22 février 2010, pour quitter Cuzco et la Vallée sacrée et revenir vers la côte, que nous comptons longer jusque à Lima, la capitale du Pérou, puis continuer notre remontée vers le nord, après un bref détour dans la Cordillera Blanca et atteindre l’Equateur.
Nous mettrons environ deux semaines pour effectuer ce périple, pendant lequel trois séquences nous ont plus particulièrement marquées.
En premier lieu, pour quitter la région de Cuzco et aller vers la côte, nous empruntons la route qui a été dévastée en divers endroits par les inondations, qui nous ont valu d’économiser les quelques centaines d’euros requis pour la visite du Machu Pichu (le site est toujours fermé car la ligne de train qui relie le site n’a pas résisté aux intempéries) mais qui ont surtout durement touché divers endroits de la région.
La route que nous suivons, qui n’est ouverte qu’une poignée d’heures chaque jour, fait l’objets de travaux importants – nous sommes même impressionnés pas les efforts et la très bonne organisation mise en place par les travaux publics locaux, compte tenu de la topographie des lieux et de l’impressionnant débit du fleuve qu’épouse la voie.
Nous traversons parfois des paysages d’apocalypse, les maisons d’adobe ayant été purement et simplement rayées du paysage, ne subsistant que de vagues tas de boue, d’argile et paille, à côté desquels sont plantées les tentes acheminées par le gouvernement local, leur aspect flambant neuf – c’est déjà ça – contrastant avec la physionomie lugubre des lieux. L’énergie apparente des habitants qui, au milieu de ce spectacle de désolation, au gré des apparitions du soleil qui fait ressortir le sublime des paysages que nous traversons, continuent de vivre, travailler et même jouer … La vie continue.
Nous arrivons ensuite à Nazca, ville situées non loin du Pacifique et rendue célèbre par les pétroglyphes, immenses formes mystérieusement tracés sur des dizaines de kilomètres il y a plusieurs millénaires, représentant serpents, oiseaux, etc. L’échelle de l’ouvrage est telle qu’il est nécessaire de survoler la région en avion pour voir l’ensemble.
La curiosité nous pousse à nous renseigner sur les prix de l’opération – les compagnies aériennes qui proposent les vol ne manquent pas, la ville vivant autour de ce business touristique – mais nous gardons en mémoire l’avertissement d’Alejandro (cf nos rencontres au Chili) qui, constatant en connaisseur l’aspect des avions, y avait renoncé. La prudence naturelle et organique de ma splendide et plantureuse épouse font le reste : Nazca, ce sera repos dans un hôtel qui nous prête pour une poignée de dollars son parking, son eau à volonté, son wifi, sa piscine. On y reste scotchés deux nuits et une journée complète : lignes ou pas lignes, on avait besoin de souffler un peu !

Et ainsi, le matin où nous aurions pu éventuellement faire le survol des pétroglyphes, nous choisissons de rester sous la couette, à peine dérangés par le bruit des quelques avions qui décollent de la piste située à quelques dizaines de mètres de notre repère. Pourtant, notre sang se glacera lorsque le lendemain matin, alors que nous faisons quelques emplettes dans les vagues commerces de la ville avant de poursuivre notre course vers le nord, nous tombons sur un groupe de péruviens qui lisent avec force commentaires le journal du jour : la veille, un des avions s’est écrasés lors de son survol au dessus des lignes, faisant sept morts et aucun survivant – donc, l’un des engins que nous avons entendus décoller et que nous aurions dû emprunter… Qui a dit que la vie tient à peu de choses ?…
Nous quittons ainsi la zone sans regret, et nous contentons d’essayer d’apercevoir les motifs depuis le mirador sur la panaméricaine ! Mais, à défaut de pouvoir les observer – ce n’est pas la bonne heure -, nous aurons une bonne vue de l’avion, dont les débris pulvérisés gisent à quelques dizaines du mirador et de la route…
Sur ce, ravis d’exister encore, nous poursuivons plein nord et le temps de faire quelques centaines de kilomètres, deux pauses dodo et soixante-quatre pauses vidanges de boites à m…e pour cause de turista côté Valérie – quand je vous dit que le vie reprend toujours son cours – nous parvenons un beau dimanche (le 28 février 2010) dans l’immense capitale du Pérou, Lima. Nous découvrons donc pêle-mêle le quartier de Miraflores, le parque del Amor, le quartier Baroco, et de la piste d’envol de parapente depuis la falaise qui surplombe le Pacifique, le couvent San Francisco. Ce dernier intéresse moyennement les enfants jusqu’à ce qu’on pénètre dans les catacombes : une labyrinthe obscur et des nonos humains entassés un peu partout, et la sortie devient tout à coup sympa. En résumé, ce qui plait aux enfants : 1. les taxis et 2. les trucs morbides …
Mais pour nous, Lima, c’est l’épisode San Isidro, où nous avons bivouaqué durant trois nuits. Tout commence avec Xavier, un expatrié français que nous avons rencontré aux abords du Lac Titicaca, et qui travaille pour l’ONU à Lima. Malgré un emploi du temps très chargé, il nous fait l’amitié de nous recevoir chez lui quelques instants. Que font des français lorsque ils se rencontrent ? Ils parlent bouffe, tiens ! Donc, nous repartons avec quelques adresses de restaurants et évidemment un panorama des lieux, mais en prime, avant de nous séparer, je lui demande si il a une idée du lieu où nous pourrions bivouaquer. Il me conseille de tenter un parking situé entre deux immeubles très chic, au bord d’un parc – le quartier, San Isidro, est extrêmement » sélect « . La quartier semble calme, joli, arboré : le rêve du camping-cariste en centre ville ! Malicieusement, il me dit aussi de le tenir au courant de la suite des évènements : dans les grandes villes d’Amérique du Sud, les quartiers chics, calmes, jolis, arborés sont en général … sécurisés. Et les habitants vont avec.
La première nuit, rien de notable mais dès le lendemain matin, le policier municipal en patrouille (moyenne des passages en journées ou de nuit : toutes les demi-heures !) vient me faire une leçon de morale d’un quart d’heure sur nos vélos, trop voyants, mal attachés (une chaîne et un antivol, quand même) qui risquent d’attirer la racaille. De plus, sa juridiction s’arrête aux limites du quartier, qui est à une centaine de mètres, donc il ne pourra pas poursuivre les bandits bien loin … S’ensuit une discussion sur son travail, au cours de laquelle il m’indique regretter de n’avoir qu’une matraque là où, en face, l’équipement standard est tout autre ! Comme tous les policiers et gardes privés que nous croisons, il est tout de même équipé d’un gilet pare-balle. La discussion close, j’obtempère et mets mes vélo au frais dans le tampicar.
Mais le soir, ça se corse !

La nuit tombée, je fais une petite sortie hors du tampicar pour prendre quelques photos, lorsque une voix m’interpelle, au dessus de ma tête, d’un des immeubles. La silhouette d’une dame d’une soixantaine d’années émerge, dans la pénombre, d’une fenêtre. Elle m’indique directement que je dois partir, que je ne peux pas rester ici, que c’est interdit, et ainsi de suite. J’essaie de ne pas me démonter, en discutant sur les registres 1. je suis gentil et 2. le parking est public (en fait, je n’en sais rien). Pendant l’entretien, moi sur le trottoir et la dame dans sa tour de béton armé et de vitrages haut de gamme, j’aperçois juste derrière elle, légèrement en retrait, les yeux d’un énorme chien qui luisent dans l’appartement qui semble être toutes lumières éteintes. Le décor est planté. Puis, m’avertissant une ultime fois qu’elle a appelé la police, la dame disparaît – les yeux du chien avec – et pendant que je me demande si d’autres personnes ont assisté à la scène, la police arrive.
Ou plutôt : les polices.
Car, en l’espace d’une minute, se garent devant mon inoffensif et beaufisant camping-car la moto de la police municipale, et les voitures de la police privée puis de la police nationale, tous gyrophares en fonctionnement ! Tout ces jolis véhicules clignotent de partout … Curieusement, c’est la police privée qui se charge de me parler, les trois autres personnes en uniforme restant en retrait, parlant entre eux et avec leurs radios – à cet instant, je me dis que la scène a vraiment une allure de série américaine !Mon interlocuteur attaque sur le thème » toi devoir partir » car c’est le parking des habitants des immeubles, et moi je contre attaque sur le thème » ça ayant être le parking PRIVÉ des habitants ou le parking PUBLIC qu’utilisent les habitants ? « . La discussion s’enlise gentiment, si bien que je décide de jouer mon va-tout, l’arme décisive, ma puissance de feu maximale : je passe la tête dans le camping-car et lance à Valérie « Valé, ça craint, il faut mettre le paquet : envoie moi les deux filles AVEC leurs tongs roses. »
Nous voici donc à présent dans un face à face déséquilibré, les policiers armés et leurs gyrophares clignotants (qui n’ont aucune chance) faisant face à mon petit crâne tout chauve autour duquel tournent en rigolant mes deux filles et leur quatre tongs roses (qui ont parfaitement compris la situation).Le dénouement ne tarde pas, et se passe en deux temps.
Premier temps, le policier revient d’une communication radio avec son supérieur, et ce dernier a dû lui remonter les bretelles : sur un ton tout gentillet, j’apprends que nous pouvons rester, que tout le monde s’excuse, qu’il n’y a pas de problème, et que tout est en règle – sachant que, à aucun moment on ne m’a demandé mes papiers, mais passons …
Deuxième temps, double-effet tongs roses : cinq minutes plus tard, je suis rentré dans le camping-car dans lequel les enfants piaffent d’impatience devant la pile de crêpes encore fumantes du repas du soir, mais on tape à la porte. Tout le monde est encore là, et avec en bruit de fond les bruits de communication radio, mon policier s’adresse encore à moi, car il y a du nouveau ! » Maintenant, vous êtes invités ici, vous pouvez rester aussi longtemps que vous le souhaitez. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, demandez Cecilia, appartement 8, 3e étage » et, effectivement, simultanément, j’aperçois un visage souriant et une main qui s’agite effectivement du 3e étage, juste au dessus de l’appartement à la dame au chien) !
Laquelle Cecilia, active quadra qui se lève tous les matins à 5 heures pour aller faire son jogging sur le front de mer, viendra un peu plus tard discuter, excuser ses voisines prétendument rendues paranoïaques par une tentative de cambriolage récente … et offrir des chocolats aux enfants !
Quel épilogue, non ? Alors, l’ami Xavier : le test a bien fonctionné ! Et – de justesse – tout est bien qui finit bien …
Un peu plus tard dans la soirée, sur un registre bien moins léger, nous recevons des nouvelles de nos amis Chiliens, venant d’apprendre que le tremblement de terre au Chili avait eu lieu : tous sains et sauf, même si le camping-car d’Alejandro, celui-là même à côté duquel nous étions stationnés dans son jardin, a été emporté par le tsunami. Décidément …
Et nous apprenons aussi que, sur la côte péruvienne, près d’Ica, le jour même où nous y étions passés, l’océan s’était retiré de 150 mètres … mais le reflux avec été normal. Nous n’avions rien remarqué, ne connaissant pas son niveau habituel, mais tout de même …

Pour le reste, c’est pêle-mêle : des dunes gigantesques avec des airs de Sahara, un réparateur de mototaxis qui me renforce en une-demi heure le fond de mon réservoir d’eau qui fuyait gentiment depuis deux mois, la chaine de montagne Cordillera Blanca normalement toute blanche à cause de la neige mais pour nous bouchée à cause des nuages, l’abominable traversée du Canyon del Pato (10 heures pour 80 kilomètres), la visite de l’extraordinaire temple de la Lune puis des ruines de la plus grande cité d’adobe du monde, Chan Chan … et enfin la frontière Pérou – Equateur, que nous traversons avec succès le 9 mars 2010.
Et les rares lecteurs, travailleurs immenses et courageux, ou glandouilleurs devant l’éternel qui sont arrivés ici ont le privilège d’avoir le menu du prochain post, car ce sera une destination mythique : ze Galapagos !
Article écrit le 29 mars 2010 à Quito (Equateur), 2800 mètres d’altitude, un pti 20 degrés et le temps qui fait rien que changer …
Entre Cuzco et Lima, via Nazca :
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Lima :
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La Cordillera Blanca pas blanca du tout :
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Le temple de la Lune et du Soleil :
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Les ruines de cité de Chan Chan :
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